dimanche 26 novembre 2006

Lansb Mag Classic: un document d'archives exceptionnel !

Un dicton populaire bien connu clame que la valeur n'attend pas le nombre des années. On pourrait ajouter que la connerie non plus. Et nous le prouvons ! Aujourd'hui, spécialement pour toi, ami lecteur, une équipe de "conneristoriens" a déniché une perle: des révélations fracassantes sur le passé du plus malicieusement imbécile des magnats de la presse, votre prétentieux serviteur. Oui, au passage, je ne supporte plus les "humbles serviteurs", sus à la fausse modestie.

A l'époque de ses légendaires études d'ingénieur donc, votre imbu-de-sa-personne serviteur dirigeait une non-association ayant défrayé la chronique sur le campus, le "Club Misère". Prenant à contre pied le courant associativo-bénévolo-estudiantin, celui qui allait devenir le L avait réussi à propulser cette connerie-hommage à Coluche jusque dans la presse nationale !

En effet, L'Express n°2490 du 25 au 31 mars 1999 publiait un article sur ce fameux (et défunt) Club Misère. Nous avons retrouvé ce précieux document et ce n'est pas sans une certaine délectation que nous vous l'offrons aujourd'hui comme une tribune sur un passé de jeunesse insouciante, sur un état d'esprit peut-être pas si has-been que cela...

A titre anecdotique, l'histoire d'amitié entre le L et le M naquit progressivement suite à un mail général (à l'attention de l'école entière) sobre mais sans équivoque du futur "M": "J'encule Lambert et le Club Misère". Bigre bigre...






mardi 21 novembre 2006

32 ans de Manu Tessanne: son fan club témoigne...

Un cliché rare: Manu Tessanne dans un état presque normal. Ce garçon demeure un mystère et le fantasme de tous les psychologues...

32 bougies déjà pour l'immensément populaire Emmanuel "Man" Tessanne. Le plus célèbre et à la fois inélégant des moniteurs d'escalade de la vallée du Grésivaudan reçoit, pour l'occasion et via son fan club officiel, de nombreux témoignages d'amitié (ou pas) venus de la région toute entière...

Voici en exclusivité pour Lansb Mag un véritable « pot pourri » du « Courrier des lecteurs » de son fan club: le TTTTTTTTTTFC (Tapette Tarlouze 'Tain T'es Trop Top on T'adore Tous pour Toujours Tessanne Fan Club)

De la part…

… d’une ancienne étudiante ayant effectué un très court passage au Gucem:

Espèce de salaud,

Au fond t'avais raison, j'étais mignonne mais la moustache ne m'allait pas. Je ne te remercierai jamais assez de me l'avoir fait remarquer en public... Après une épilation au laser et deux ans de thérapie pour surmonter les troubles mentaux que ta rencontre a provoqués, j'ai enfin pu réaliser mon rêve. Tu n'es qu'un gougnafier mais finalement tu m'as ouvert les yeux. On va dire qu'on est quitte.

A jamais,

Titia, mannequin à l'agence Elite.

… d’un client:

Cher Monsieur Tessanne,

Je vous remercie pour la belle journée de plein air vécue à vos côtés. Je ne regrette absolument pas les 50€ de participation aux frais pédagogiques et matériels. En revanche, je suis consterné de voir l'usage que vous faites de cet argent dûment gagné dans d'obscures soirées Chartrousines. Je ne vous en félicite pas.

David Sayatham.

… d'un ami spéléologue :

Yo Man,

Ce mot tient lieu de cadeau: c'est un « bon » pour une nuit toutes options avec Maud Simonet-B. Tu verras c'est de la bombe ! Joyeux anniversaire !

Pascal G.

… d’un admirateur anonyme:

Bonjour Emmanuel,

A Orpierre, j'ai déposé, avec un peu d'avance, un présent sur le toit de ton Vito. Comme tu as pu le voir, c'est un cadeau qui venait des tripes ! Ne me remercie pas, les amis sont là pour ça,

Pour la suite, je te dis « merde ! »,

Mathieu C.

… d’un ami de 30 ans:

Salut Manuel,

Nous nous sommes toujours connus et avons tout partagé en deux: tu as eu le mental et j'ai eu la force. Bon, c'est vrai, tu as aussi eu la force. Tu as eu Charlotte et j'ai eu la liberté. Disons plutôt que tu m'as pris Charlotte et que du coup j'ai été libre. Tu travailles avec des amis sympas et j'ai du supporter le Lansb et le Blanchard tout l'été. Mais je sens que la chance tourne enfin: en effet, j'ai toujours plein de cheveux et ta calvitie progresse au grand galop: tu finiras avec une casquette en peau de fesses !

Je te déteste, passe un anniversaire pourri !

ton employeur et ami d'enfance, le Foué.

Un message qui vient du Ciel:

Au nom de Moi, du Fils, et du Saint Esprit, Amen !

Bon anniversaire mon fils. Je suis encore une fois désolé d'avoir raté la conception de tes attributs génitaux. J'étais un peu distrait et j'ai utilisé le même moule que pour ceux de Michel Petrucciani. Je constate avec plaisir que tu fais malgré tout un usage honorable de ton ersatz de pénis. Embrasse Chloé et Camille pour moi, et dis à Romain qu'il pourrait passer manger à la maison voir son vieux père de temps en temps.

Dieu.

… de Gabriel F.


Joyeux anniversaire Manu ! J'aurais aimé te voir plus souvent ces temps-ci mais ma copine fait sa première dent et du coup elle dort mal et pleure beaucoup. Comme on est réveillés toute la nuit j'ai dû inventer des jeux pour passer le temps au lit, je t'expliquerai...
Bien à toi,

ton Falcounet.

… de la DRJS Rhône Alpes

Monsieur,

Nous apprenons suite à de longues recherches que vous avez été le conseiller de stage d'un candidat qui vient de brillamment réussir l'examen final du BE Escalade. Devant les performances stratosphériques réalisées par votre protégé lors de ces épreuves, nous souhaitions vous adresser nos sincères félicitations pour le travail de coaching et de formation que vous avez effectué sur ce personnage d'apparence ingrate. Sachez en outre que les portes du MJS vous sont ouvertes et que vous nous honoreriez d'accepter un poste de consultant. Votre prix sera celui du contribuable.

Veuillez agréer, bla bla bla,

… du Président de ton fan club...:

Salut mon Man’,

Cher et grand ami, pour ton anniversaire et compte tenu de tes compétences avérées en matière d'enfants, je suis prêt à partager avec toi ce que j'ai de plus cher au monde... Accepterais-tu la garde alternée du Jouy ?

Très amicalement tien, ton ami le L.

lundi 20 novembre 2006

Nouvelle formule !

"Lansb Mag écrit tout haut ce que les autres n'osent pas penser tout bas."

Tel est le nouveau slogan du #1 de la presse montagno-people iséroise. Un an presque et demi d'une existence cahotique n'ont pas eu raison du nouveau né, même s'il présentait des malformations a priori fatales. Les esprits malades et fébriles qui sont responsables du flot quasi ininterrompu de connerie sur ce canal en ont enfin terminé avec la grande saga de l'été.

Ce timing semble être parfait car la belle saison vient justement de s'achever ce week-end, le mercure ayant finalement accepté de passer sous la barre des 20°C... L'hiver arrivant donc (enfin ?), il va être grand temps de "faire du gras" telles les marmottes afin de se mettre à l'abri de la morsure du froid. Et pour être gras, LM ne craint personne, pas même Jabba the Hut ou son jumeau Guy Carlier...

C'est donc avec une certaine émotion que nous vous présentons, dans ce nouvel écrin, la collection "Connerie Automne-Hiver 2006/2007". Nous espérons que notre lectorat en expansion exponentielle (à moins que ce ne soit logarithmique, mes souvenirs sont vagues) saura apprécier ces quelques kilogrammes de gras dans un monde de finesse...

mercredi 15 novembre 2006

LPCMI 2006: U, V, W, X,, Y, Z comme... Z'est fini !

U comme U mo paese

J’y tiens à mon village. Mes racines sont là, mes plus beaux souvenirs d’enfance aussi. Pour lui, pour ma grand-mère, pour Elsa, je suis encore capable de faire des « folies » comme à 20 piges. La fête de l’église, rassemblement incontournable ces dernières années, a été le théâtre d’une de ces « conneries » qui défoncent la santé, mais qu’on referait pareil si c’était à refaire. Le 11 août, après avoir encadré en canyon toute la journée, j’ai ramené les clients à Zonza, rangé le matos avec eux, m’excusant de ne pas aller boire un coup (une fois n’est pas coutume).

En voituuuure ! C’est un combat de rue toutes options, dépassements 4 étoiles (euh, 4 points plutôt) sur la descente de Bavella, franchissement du mur du son à Vix, traversée « sportive » de Ghisonaccia, remontée à bloc au village par Chiatra. Je regrette que ma mère n’ait pas été dans l’auto, elle aurait apprécié ces… 115km de routes Corses. Ceux qui les connaissent savent qu’il vaut parfois mieux faire le triple sur autoroute ! Douche, petit « en cas » avec Tonia, et ensuite, fête sur la place. Enfin attablés, on mange, on trinque, on discute, on rigole. C’est une des rares occasions de voir l’ensemble de la population établie et des estivants réunie. Ne la ratons pas. La plupart des anciens sont là, plus ou moins en forme. Je prends quelques clichés, pas folichons aujourd’hui mais qui prendront une autre perspective quand ces mémoires vivantes des temps passés se seront éteintes…

Je me couche vers une heure du matin, sans excès. A six heures et quart, après un bref petit déjeuner, je reprends la route, quittant un Petricaghju à peine endormi. A huit heures moins le quart, au terme d’un voyage à Mach 12, je gare la caisse fumante devant Corsica Madness*. Les premiers clients vont arriver, je suis déjà épuisé. Il faut pourtant partir en montagne et gérer une nouvelle journée de travail… Finalement, être logé à Zonza, ce n’est pas si mal !

Petricaghju, havre de paix.

V comme Vacca

Un magnifique canyon encaissé, aux biefs magnifiques et aux sauts amusants. Un saut de 24m que le destin m’a empêché de faire le jour de mon départ. Aurais-je sauté ? Peut-être pas. Si oui, m’en serais-je tiré indemne ? Peut-être pas non plus… Ca me fera un bel objectif pour 2007 !

V comme Vomir

Boire l’eau des rivières, faire fondre de la neige pour s’hydrater, ce n’est pas la première fois que je le fais. Ca fait des années que donne priorité à ma soif du moment par rapport à d’éventuels problèmes gastriques inhérents à cette prise de risques. Mon opinion va peut-être changer. Rappel des faits : Romain perd sa bouteille en canyon, celle de Mathieu* se vide malencontreusement. Mat fait le plein d’eau de la Purcaraccia et donne à boire au Lansb, avant d’engloutir le reste de la flotte maudite.

Quelques heures après, Mat est malade comme un chien. Il a même appelé le 112 pour obtenir le numéro du médecin de garde, car nous n’étions pas présents dans la chambre ! La nuit venue, Foué* parti en repos avec ses parents, je profite du grand lit. Ainsi, pensais-je, je ne risque pas d’être malade à mon tour et de compromettre mes chances dans la course du San Petrone. Je n’aurais pas besoin de ça …. Mat dort dans l’autre chambre. Je suis réveillé en pleine nuit par un bruit de gargouillement atroce. Quelqu’un agonise. Je me frotte les yeux, m’appuie sur les coudes dans le lit. Mathieu* vient de vomir* sur la moquette de sa chambre. Dans l’obscurité, je vois le malheureux bondir vers les toilettes, dans un élan désespéré. Trop tard. Arrivé au pied de mon lit, il s’arrête net, casse le buste en deux, tête entre les jambes. Bloooah ! Il vient de récidiver. Mat finit sa course dans la salle de bain, pour s’essuyer le visage, et passera un long moment assis sur le carrelage, déconfit. Les malheurs du haut-savoyard ne s’arrêtèrent pas là : le lendemain, entre diarrhée et vomissements, il est totalement déshydraté et en hypoglycémie. Lors d’un court passage au Zampo entre deux accès de fièvre, pour prendre l’air (à 20 mètres de la maison), il s’effondrera, faisant souffler un vent de panique dans l’artère principale du village quand les pompiers interviendront !

Ces péripéties vaudront à Mat, le temps de quelques heures, le surnom* de « Vomito ». J’aurais mieux fait de ne pas me moquer. Les effets de la Purcaraccia ont mis 48h pour me démonter la tronche, mais j’y ai eu droit aussi. De retour du village où je me remettais de ma course manquée, le dimanche soir, j’ai la sensation inédite d’avoir envie de vomir* en conduisant. Bizarre, ça ne m’étais jamais arrivé. Je débarque à Zonza* à 23h30 et ne demande pas mon reste : au dodo ! Il va me falloir des forces car je suis revenu exprès pour palier à la maladie de Mat. Deux heures plus tard, j’ai une boule de métal dans le bide : que ça fait mal ! Je me tords de douleur dans mon duvet, et demande à Mat des médocs. Rien n’y fera : une heure après, je fonce aux toilettes et rends l’intégralité de la tarte aux herbes de ma grand-mère, secoué par plusieurs spasmes violents. Sophie*, que mes compères viennent de récupérer à l’aéroport d’Ajaccio, et qui dort par terre, est ravie de cet accueil princier. Je passe une grosse demi heure avachi sur la cuvette, ne sachant pas quelle sortie choisira le liquide indésirable pour s’échapper de mon corps tremblottant…

Le lendemain, je suis complètement épuisé, d’une faiblesse… « Blanchardesque ». Alité jusqu’en fin de journée, alternant poussées de fièvre et chiasse mexicaine, c’est finalement… Mathieu* qui prendra mon groupe en charge et me remplacera ! Je lui avais rendu un service identique samedi…Un partout, la balle au centre. Mais c’est terminé : on ne nous reprendra plus à ingérer la flotte de ces rivières ! Le bruit courait, à Bavella, qu’un cadavre de mouflon avait été vu en amont du canyon… probablement une victime des crûes orageuses des jours précédents… L’orage* venait, indirectement, de faire deux victimes de plus.

Z comme Zonza

Le village clé de l’Alta Rocca. Au pied des aiguilles, ce village très touristique sait garder une âme. Il a de la gueule, il est situé dans une des plus belles forêts Corses, l’Ospedale. J’ai aimé mon séjour là bas. Ce n’est pas le même attachement qu’à mes racines familiales de Castagniccia, mais j’ai envie d’y retourner. La saison « touristique » y est acceptable, même agréable, ce n’est pas Saint Tropez, ni même Porto Vecchio. Et il y a tant à grimper…





LPCMI 2006: S et T comme...

S comme Sophie

Connaissance de Mat Blanchard et du Foué* Chopard, cette grenobloise est venue en renfort pour s’occuper du secrétariat de « l’association », et ce dès la fin juillet. Sympa et mignonnette au premier abord, j’ai eu la délicatesse de l’accueillir, malade comme un chien en vomissant bruyamment à quelques décimètres de son duvet . Pourtant, en gentleman, j’ai eu l’obligeance de déposer ma tarte aux herbes à peine attaquée par les sucs gastriques dans la cuvette. Grand seigneur. Au fil des jours cependant, la miss a montré quelques limites. Sa présentation des canyons, véritable institution, était aussi invariable qu’une règle de grammaire :

« Entrez, il y a des photos. Sur votre droite, le canyon de la Purcaraccia, un canyon très ludique, avec des toboggans et deux grands rappels* », débitait elle sur un ton monocorde.

- Sur votre gauche, la Vacca*, un canyon essentiellement de sauts.

- Mais certaines personnes intelligentes le font aussi !

s’exclamait un Foué* soudainement apparu à la devanture du local. Les clients s’esclaffent. Sophie pas.

- Elle n’a pas encore saisi ma blague !

renchérissait la « machine à anecdotes* », sourire aux lèvres, les épaules situées à 80cm de part et d’autre de son cou. Et le voilà de rebondir dans une description « adaptée » des possibilités des canyons proposés, vantant en priorité les mérites de celui pour lequel il restait de la place le lendemain, usant de son charme pour séduire les dames, de son humour pour inscrire les messieurs, etc…

C’est parfois ce type d’attitude « vendeuse » qui a manqué à Sophie M., par ailleurs très gentille et serviable (merci pour la vaisselle !). Je n’irai pas, comme l’ultraviolente « Blanchardisation », la classer définitivement dans la catégorie « des gens que je considère comme inutiles » ! Quoique… Son copain (à Sophie, suivez !), prénommé Mathieu* lui aussi (décidément), avait la fougue de ses jeunes années. Avec tout juste deux décennies au compteur, il a tenu quelques propos illogiques (« La moto est bien plus physique que l’escalade ») que son jeune âge nous a aidés à pardonner avec la condescendance, de nos yeux d’adultes. Il est vrai que ses déclarations tonitruantes étaient difficilement défendables, lui, le motard au physique de crevette, comparé à celui d’un grimpeur de bloc pur jus, le Foué*. L’une de ses interventions les plus marrantes a eu lieu au « Randonneur », où nous avions nos habitudes. Il s’agit d’une petite pizzeria Corse ayant pignon sur rue à Zonza*, avec un patron costaud et impressionnant, roulant soit dit en passant dans une magnifique Audi RS4. L’ami Mathieu*, originaire de la bourgeoise ville de Senlis, s’en est allé demander un « café gourmand ». Devant l’incompréhension de la serveuse (Anglaise !), il a éclairci son propos en parlant d’un « café assorti de petites mignardises ». Tronche ahurie de la demoiselle, encore plus perdue ! On avait du mal à ne pas éclater de rire !

S comme Stagiaire

CENSURE PAR LE CSA (Comité de Sauvegarde des Apports en euros)

S comme Surnoms

Nous nous en sommes affublés. Rien de surprenant, je m’en suis déjà, vous le savez, attribué plus d’une dizaine au cours de ma vie. « Le Véra de la Castagniccia » a cette fois été choisi pour moi, par Foué*. Quant Mat a demandé pourquoi un véra, Foué* a été tranchant :

« Ben si, Romain c’est quand même un gros porc ! »

J’ai été touché. La sagesse, le calme, le rôle de « juge de paix » plaisant bien à l’armoire à glace Chartrousine, il se vit coller l’étiquette de « Vache placide de Bavella ». Quant au bambin binoclard, légende vivante du dortoir filles des résidences universitaires, son habileté, sa soif d’indépendance, son aisance firent de lui « le Cabri de l’Alta Rocca ».



Le « cabri de l’Alta Rocca » prend son envol devant un parterre (ou un par-mer ?) de clients ébahis !


La « vache placide de Bavella » n’est jamais à court de bons mots. Et toujours cette largeur d’épaules unique sur le continent Eurasien…


S comme Sniper

Des clients, nous en avons vu des centaines. Le plus original, en ce qui me concerne, était un jeune ancien combattant, euh à moins que ce ne soit un ancien jeune combattant ? A 24 ans, il était « sniper » dans l’armée, tireur de précision. Il pouvait dégommer à +800m ! Il manquait un doigt à ce garçon, arraché par une balle de paysan en Côte d’Ivoire. Il avait également été victime d’une balle dans la tête. Un type simple, discret sympa, ayant aussi bourlingué au Kossovo et dans d’autres contrées dangereuses, mais qui avait malgré tout un peu peur en rappel* ! Peut-être avais-je eu tort de lui affirmer qu’il ne risquait rien, une situation nouvelle pour lui…

Autre personnage haut en couleur, Valery. Un type du Sud, vendant des hélicoptères ! Pas banal ! Ses gosses étaient sportifs et sympas, j’ai bien accroché avec cette petite famille qui a fait plusieurs canyons en notre compagnie.

Je me souviens également de deux beaux mâles, la trentaine bien entamée, propres sur eux, bronzés, poilus, le cheveu coupé et coiffé, la belle Audi A3. Convaincu qu’ils vivaient ensemble, j’ai ai eu la confirMation quand, à la fin de la journée, ils m’ont dit : « tu sais, on a du mal à avoir des enfants ! » en éclatant de rire. Ils étaient beaux et vraiment sympas. Ca vaut parfois mieux qu’une troupeau de gonzesse au physique répugnant. Un excellent souvenir que ce couple pas comme les autres.

Bon souvenir de Gilles et Hélène, un ex gendarme et une motarde, la cinquantaine tous les deux. Sympas, sportifs, et ouverts. De quoi vous faire aimer les képis, un comble ! Il fallait rien que pour cela les mentionner.

Enfin, et sans bien sûr être exhaustif, je tiens à mentionner le trio Jérôme, Angélique, et Isabelle. Sympas ces trois là. Jérôme a été l’auteur d’une remarque mythique à l’attention d’un touriste qui me demandait, comme tant d’autres avant lui, si « ça saute là ? ». Comme d’habitude, ne voulant prendre aucune responsabilité vis à vis de gens qui ne sont pas de mon groupe, j’ai esquivé la remarque, ignorant mon interlocuteur. Ca peut paraître un peu rustre, mais je ne veux pas d’emmerdes. Il réitère alors sa demande auprès d’un de mes clients :

« Ca saute dans la cascade là ? Vous avez sauté vous ? »

- Non, on a regardé la cascade et on s’est branlé !

Je regarde, médusé, Jérôme, hilare, fier de sa connerie. Ca m’a plu, vous vous en serez douté ! Le touriste n’a pas demandé son reste et s’est barré sans crier gare…

T comme Téléphone

Trempé. Bidon étanche de merde. Ou inattention de merde, j’ai du mal à choisir. Le résultat est le même ! Je démonte mon téléphone portable, indispensable élément de sécurité, range la batterie, mets ma carte SIM à l’abri, et pose la coque sur le muret de Corsica Madness*, pour qu’elle sèche. Mon écran est criblé de gouttes, de l’intérieur ! Quel bel objet ! Qui pourrait avoir envie de ça ? Un crève la faim a pourtant profité d’un moment d’inattention de Jérôme* pour me voler cette partie de mon Siemens à 1€ vieux de deux ans… et qui ne marchait même plus ! A la limite je m’en serais foutu, si ce n’est que ce minable larcin m’a empêché d’avoir accès à mes messages. Un, en particulier, m’aurait intéressé : Sophie Di Sante, l’amie de Nico, basée à Ponte Leccia, avait vu que ma course avait été avancée d’un jour, et me le disait sur répondeur. Ma grande déception de l’été aurait été évitée…

samedi 11 novembre 2006

LPCMI 2006: R comme...

R comme Rater sa vie

Par une belle journée, j’arrive de canyon avec des clients, dans un Zonza* bouillonnant de vie. Les tables des cafés sont pleines à craquer, des touristes dégustent des coupes de glaces géantes, certains jeunes Corses se « montrent », cheveux gominés, lunettes sur le nez et gros cubes rutilants garées à proximité (un tel manque de discrétion me répugne !). Les gens déambulent nombreux dans la rue principale, s’offrant des produits locaux, feuilletant livres, choisissant quelques cartes postales. Notre devanture ne désemplit pas, les canyoneurs du jour, ravis, rangent leurs sacs non sans fierté devant des badauds qui, devenus curieux, s’intéressent, pénètrent dans le local, posent des questions, matent les photos. Mat, qui était déjà rentré de la Vacca*, venait d’achever de suspendre ses combinaisons et plaisantait avec ses clients. Une fin de journée idéale, quand on a bien travaillé. Jovial après une belle sortie, j’entre en trombe dans Corsica Madness* et interpelle une mère de famille, juge d’instruction de son état :

« Alors, ça vous a plu ? Il a été gentil Mathieu* ? »

- Oui, très bien, c’était super !
- Vous avez bien fait d’aller avec lui alors. Si vous avez trouvé ça super avec lui, avec moi vous auriez trouvé ça génial, vous seriez immédiatement tombée amoureuse de moi, vous vous seriez rendu compte que vous avez raté votre vie !

J’ai adoré cette connerie sur le coup. Je l’ai vite regrettée : la dame a mis fin à ses jours le lendemain** ...

R comme Rappels

Un matin au local. Mon groupe est là tôt, je suis prêt à décoller, il n’est pas 8h30. Me voici donc, une fois n’est pas coutume de bon matin, de fort bonne humeur. Je constate à regrets que c’est Mat qui a récupéré les deux buenasses qu’on avait inscrites la veille. Lucky boy. C’est lorsque l’une d’elle déclare avoir peur en rappels et avoir déjà pleuré à l’occasion d’un tel exercice que je me suis finalement dit que j’étais très bien avec mon groupe de mâles. Mat lui, commençait sans doute à se rendre compte qu’il allait passer une rude journée en fin de compte. Soudainement inspiré, je pris la parole, singeant comme à mon habitude lors d’un briefing (ou de consignes*) mon Maître absolu, le « Camelback à pisse », l’illustre Apremontois Manu Tessanne. Je dis à la jeune fille, du ton le plus dogmatique possible :

« C’est très simple. Si tu as peur en rappel*, voici ce qu’il faut faire : tu colles tes lèvres sur celles du moniteur, et tu aspires très fort : tu seras collée à lui et donc en sécurité. C’est bien clair ? »

Parti dans un grand éclat de rire, le Mat, pourtant si prompt à dire des horreurs en privé, ne savait plus où se mettre. Je quittai les lieux rapidement avec mon groupe, ayant hâte de retrouver mon collègue soir pour savoir s’il avait mis à profit cette connerie pour se rapprocher de sa belle cliente…



Un moment fort du canyon : les rappels. Du plaisir pour certains, du gros stress pour d’autres…

R comme Ravis

On serait tenté d’en douter, à la lecture des péripéties et gueulantes parfois poussées. Eh bien sachez que tous les clients que j’ai eu entre les mains ont été ravis. Il en a été de même pour mes deux acolytes, à l’exception d’une journée d’orage* mémorable où les clients étaient déjà bien contents de rentrer en vie, lors d’un repli magistralement orchestré par mes amis titulaires (je ne suis qu’un humble « stagos »). Presque toujours, nous avons bu un coup, mangé une glace, une crêpe, ou un panini ensemble, après l’effort. Mes clients m’ont toujours invité, et dans les rares cas où ils m’oubliaient, Caro ou Béa* m’offraient la conso. Une entente en bonne intelligence. Parfois, plus rarement, il est arrivé de toucher des pourboires. Le grand père de deux jeunes filles m’a un jour donné 10€, c’est mon record personnel. François a été quant à lui gratifié d’un bifton de 20€, offert par un couple Croate. Cocasse non ?

** Ceci est bien évidemment faux ! La dame se porte comme un charme !

mardi 7 novembre 2006

LPCMI 2006: P, Q comme...

P comme Poutre

Foutu grenier : l’accès est non éclairé, le plafond est super bas… Après m’être fracassé le crâne deux trois fois soit dans l’escalier, soit sur la poutre au dessus du micro ondes, je décide de jouer la prudence. Je monte un matin à quatre pattes, histoire de m’éviter un nouveau réveil douloureux et misérable. En haut des marches, je me relève, content de moi. Baaaaam ! Mon crâne rasé vient de s’encastrer sur une lourde poudre : j’ai mal du compter, il devait manquer une marche. C’est Foué* qui m’a rappelé cet épisode, il m’avait entendu hurler de violentes insultes à l’attention de ce plafond décidément bien bas…

P comme Pigeault

Le bellâtre, l’AMM le plus sexy de la région. Ou pas. Christophe est un personnage controversé, dont la légende prétend que sa voiture aurait été plastiquée. Au final, d’un point de vue personnel, nous nous entendions bien. Je veux dire par là qu’il me laissait obligeamment doubler son groupe sans rechigner ni faire de remarque, une fois qu’il s’était rendu compte que j’étais systématiquement plus rapide que lui (sans porter un quelconque jugement sur ses compétences, il avait, à sa décharge, souvent des groupes très chargés). Je crois que Mat et Foué*, également plus efficaces et le dépassant régulièrement, n’ont pas toujours entretenu de bons rapports avec cette montagne de muscles. Au final, je pense que c’est un type correct qui gagne sûrement à être connu.

P comme Petru

Petru : un vieil homme au visage buriné par le plein air, barbu comme pas deux, qui tient une auberge sur le magnifique plateau du Cuscione. Nous y avons dîné un soir tard, invités par Henri qui nous avait tous trimballés dans son PT Cruiser décapoté. Une vieille table en bois, de la viande et des légumes maison, une bouffe campagnarde à la bonne franquette, comme je les apprécie tant. Autour de la table, parmi la quinzaine de convives, « Pierrot », berger rustique de 72 ans, ami d’Henri, possède un passé riche en histoires. Conversant avec lui (parfois en Corse), j’ ai appris qu’il était au Conseil Général par chez nous, en Alesani, du temps de François Riolacci. La Corse est décidément bien petite. Henri aussi s’est mis à table ce soir là. Quelques anecdotes* croustillantes ont épicé le repas, celle de son éphémère rencontre érotique avec une belle dame dans un train de nuit rentrant d’Italie est digne de rentrer dans le répertoire inépuisable du Foué*…

P comme Perdre son 8

Cela m’est arrivé trois fois. C’est énorme non ? A la Vacca*, on mouline certains clients au saut de 9m et tous sans exception au rappel* de 12m. Ca va plus vite, et comme c’est très glissant, ils ne se blessent pas aux mains en se faisant rabattre sur le caillou après une zippette que leur mauvaise position de rappel* ne leur épargne qu’exceptionnellement. Les clients sont attachés au moyen d’une longe à une queue de vache en bout de corde. Ultra simple. Leur mousqueton à vis et leur 8 pendent donc entre leurs jambes, accrochés au pontet, parfaitement inutiles. Par trois fois, j’ai eu des clients qui, malgré mes injonctions (qui a dit insultes ?) hurlées depuis le relais, ont détaché leur 8, l’ont laissé couler dans la vasque, ont tenté de nager avant de se rendre compte qu’ils étaient toujours solidaires de la corde ! Et ce malgré des consignes* simplissimes :

« Tu arrives dans l’eau, tu enlèves ce mousqueton-ci de la boucle de corde, et tu nages ».

Ces boulettes avaient le don de me mettre hors de moi car je ne comprenais pas qu’on puisse faire quelque chose d’aussi absurde : c’est comme s’ils jetaient leurs clés au fond de l’eau ! Cela m’a en tous cas valu des descentes au masque pour récupérer le Matos. Une fois cependant, m’étant rendu compte de cette erreur trop tard dans le canyon, je n’ai rien retrouvé en sondant les lieux le lendemain matin.

Q comme Quilici

« L’omu di Bavedda ». La légende locale, le grimpeur aux centaines de voies dans les environs, l’homme aux topos innombrables sur le sud de la Corse, l’ami de Nicolas Hulot, l’icône de l’Alta Rocca. Un type attachant ce premier Guide de Haute Montagne* Corse, à l’humour pince sans rire dont je fus parfois la victime, mais ceci avec le plus grand plaisir. Mon ami Mathieu* Blanchard ne fut pas épargné non plus, lui à qui Jean Paul avait dit lorsqu’ils se rencontèrent pour la première fois :

« Au début, ne m’en veux pas : je ne te dirai pas bonjour, je veux d’abord voir comment tu travailles ! ».

Le tout avec un regard de fer que Mat osa à peine soutenir. Avant que Jean Paul ne se déride et de se mette à rigoler. Jean-Paul est comme ça. Il m’a aussi « macagné » à mon arrivée, me traitant de « pinzutu » à l’évocation de mon nom de famille. Il me taquinait de temps en temps gentiment avec ça quand nous nous saluions en langue Corse le matin, au départ d’un canyon. A 63 ans, l’homme au bandeau a encore sacrément la forme. Il est aussi bougrement rapide dans la progression de son groupe, on sent toute l’expérience du gaillard. Un jour où je lui collais aux miches avec un troupeau de clients habiles, étant bien plus rapide que J.P. dans le rappel* de 12m à la Vacca*, je lui cédais, grand prince, la priorité au saut du Polonais, par respect. Il me remerciait d’un clin d’œil. Comme tous les soirs, de passage au cabanon du Parc Aventures en bord de route du col de Bavella, assis dans la voiture d’un client, je m’arrête et ouvre la fenêtre pour saluer les collègues. Jean-Paul et Jean-Pi sont là, discutant et rangeant du Matos.

« Cumu sì o pinzutu ? » me lance un Jean-Paul taquin et souriant.

- Va bè ! Mais j’ai buté toute la journée sur un vieux guide* qui n’avançait pas avec son groupe…

Je lance un clin d’œil à l’homme à la barbe blanche impeccablement taillée et repars en direction de Zonza*, hilare. D’après Jean-Pi, Jean-Paul n’a rien dit, il était scotché. On s’est revus plusieurs fois en canyon, on a pas mal causé lors de la pause finale à la Vacca*. Il m’a confié entre autres être en train de terminer un nouvel ouvrage. Il faudra se procurer ce livre, pour découvrir d’autres aventures de cet incontournable bonhomme, et en outre le secret de son inséparable bandeau…


Quand La Légende rencontre Une légende… Jean Paul Quilici, premier Guide de Haute Montagne Corse et personnage haut en couleurs, au sens propre comme au figuré !

mercredi 1 novembre 2006

LPCMI 2006: O comme...

O comme Odette

« Bonjouuuuuuuuuuuuuuur ! » Elle a une voix frisant l’énervement, la matrone du Zampo, mais c’est une dame fort gentille, souriante, et accueillante. Ciao Odette ! Mention spéciale pour Louis qui, deux mois après « l’évanouissement » de Mat à la terrasse de son café, s’inquiète encore pour sa santé : sympa aussi !

O comme Orage(s)

C’est la crainte principale en canyon avec douze clients au cul. Et je dois dire que nous avons été particulièrement gâtés cette année. En juillet, la montagne Corse a essuyé 14 journées d’orage* contre une moyenne habituelle de… 2 ! C’est dire ! A mon arrivée à Zonza*, Mat et Foué* n’avaient à la bouche qu’un gros grain esssuyé à la Purcaraccia avec évacuation sur le sentier au péril de la foudre pour « la Masse », pendant que le jeune moniteur Blanchard fonçait dans la fissure de réchappe au grand rappel* du haut. Un moment épique et terrorisant à les entendre. Je n’allais pas tarder à goûter aux joies de ces furies naturelles moi-même…

Souvent cet été, une dégradation orageuse était annoncée « à partir de la mi-journée », pour reprendre l’expression fétiche de Météo France Ajaccio.

« Il faudra profiter de la montagne le matin. Forte évolution diurne. Dès la mi journée, le ciel se couvre et la tendance orageuse se précise. Fortes rafales de vent, averses violentes, grêle. Foudre intense. Attention à l’activité électrique… ». Nous l’avons entendue un paquet de fois cette rengaine. Parfois, nous avons annulé des journées, souvent nous sommes partis plus tôt, tous en direction de la Purca histoire de ne pas être coincé dans la section engagée de la Vacca*.


C’est sûr, avec un débit pareil, ça fait moins rire…



Il n’était pas rare que le ciel se charge rapidement, puis décharge pacifiquement, faisant croire à un orage qui n’arrivait finalement jamais. Un beau jour (ou plutôt un mauvais jour) cependant, les cumulonimbus tinrent leurs promesses : pas de quartier ! Ciel chargé dès 11h du matin, l’apocalypse s’est abattue sur nous vers midi. Mat et moi, nos deux groupes, unissons nos forces. Mat était en train de faire descendre du monde au dernier gros rappel* de la Purcaraccia. Je l’évite et redescend par le sentier avec mes clients, conseillant fortement à quelques grappes de touristes en pleine ascension de se barrer au plus vite. J’entends encore la phrase suivante, émanant d’une petite fille d’une huitaine d’années, nu pieds et en monokini :

« On va pas redescendre maintenant qu’on a tout monté hein Papa ? »
- Non non, ça va aller.

Et la petite famille de continuer son chemin, sous le grondement du tonnerre…
Au pied du rappel*, je récupère ceux du groupe de Mat qui sont déjà en bas. Je pars avec mon gros cheptel nouvellement constitué pour torcher en vitesse les deux derniers toboggans, dont le fameux « toboggan de la mort » qui fait la partie « frisson » de ce canyon. Seul, j’aurais filé, mais il faut bien contenter les clients. Mat nous rejoindra juste après avec les quelques personnes qui étaient encore sur les cordes lors du déclenchement des hostilités.

La foudre s’abat de plus en plus près de nous, dans un vacarme toujours plus assourdissant. Le ciel est noir, il tombe des cordes, il se met à grêler. Nous filons nous mettre à l’abri sous le gros bloc protecteur situé à la fin de la partie haute du canyon, en rive droite. Bientôt, nos deux groupes sont en sécurité, et nous sommes rejoints par Patrice, un autre moniteur, et ses clients.

Tout le monde a gardé sa combinaison, donc personne n’a trop froid. Une bonne ambiance s’installe, les gens discutent, mangent, rient. Ils sont en sécurité. En vingt minutes à peine, le ruisseau de Purcaraccia est méconnaissable. Les aiguilles de granite compact et étanche ont fait déversé des tonnes de flotte, des canyons se sont crées de partout : le niveau d’eau monte très rapidement. Nous savons que quelques randonneurs sont encore coincés au dessus, soit par manque de temps pour descendre, soit par imprudence « délibérée ». Maintenant que nos clients sont hors de danger, Mat, Patrice et moi décidons de remonter chercher ces imprudents. Nous repartons, une corde autour du cou, vers le haut du canyon. Traverser la rivière est déjà un peu problématique pour nous, le courant a tellement forci ! On imagine déjà le retour avec les touristes…

En redécouvrant le canyon au pas de course sous la tempête, on a le temps d’évaluer les ravages causés en une demi heure : le débit est multiplié par 100 ! La grande dalle de la seconde cascade s’est transformée en immense rideau d’eau, la section de blocs entre le premier grand rappel* et le toboggan « chenille » n’existe plus : c’est désormais une immense marmite grisâtre ! Le débit dans le boyau ne donne pas envie d’y faire un tour, les cascades sont d’une rare violence. Dans le rappel arrosé*, au niveau du replat, un jet surpuissant part à l’horizontale et vient s’écraser dans la conque granitique, 10m à gauche : impressionnant ! Le piège se refermerait facilement sur les téméraires qui s’aventureraient dans de telles conditions dans le canyon.

Nous séparant au fil des rencontres, nous retrouvons au total une quinzaine de « naufragés », arc boutés sous les arbustes, frigorifiés et terrorisés. Les enfants tremblent de froid et pleurent, tout comme certaines mamans. Les pères ne font pas les fiers à bras… Je retrouve la petite famille à qui j’avais fortement conseillé de descendre, alors que je menais mon groupe tambour battant vers la sortie du canyon. Je ne comprendrais jamais pourquoi des touristes en sandales et non expérimentés ne se doutent de rien quand trois groupes de professionnels équipés s’enfuient en leur conseillant d’en faire autant…

« Vous avez bien fait de rester, hein, finalement ! »

lance-je, avec humour noir, au père de famille, penaud. Les inconscients ne se font pas prier pour me suivre, heureux de ne plus être seuls. Mat, de son côté, a également repêché une famille de cinq, quant à Patrice, il a enveloppé une gamine devenue bleue de froid dans sa couverture de survie. Nous regagnons ensemble le lit de la rivière, où j’installe une corde pour traverser. Mat et Patrice, portant des enfants, s’avancent, pendant que les touristes, pendus à la corde, tentent de ne pas se faire embarquer par le courant, avec de l’eau montant par endroits jusqu’au bide (où l’on se trempait à peine les pieds le matin même). Tout le monde arrivera à bon port sous le bloc.

Une heure et demi plus tard, lors d’une accalmie, nous retendrons une corde pour repasser rive gauche et filer sur le sentier de retour. Deux pompiers grassouillets restés sagement près de leur camion ont envoyé Seb, un autre BE, muni d’une radio, voir si tout allait bien ! Nous leur affirmons que tout est ok, le secteur est « nettoyé ». Un bon souvenir finalement pour nos clients, une bonne leçon pour les imprudents, et une certitude pour nous : « Quand l’orage tonne, si tu restes, tu déconnes ».

dimanche 29 octobre 2006

LPCMI 2006: M et N comme...

M comme Moment(s) Magique(s)

Il y en a eu quelques uns cet été. Pour mémoire, je citerai dans l’ordre chronologique le 9 juillet. Mon anniversaire, certes, que nous fêtâmes avec Elsa à St Florent, petite cité balnéaire pour laquelle j’éprouve une affection particulière. Je garde en outre d’excellents souvenirs de gueuletons intimes au « Petit Caporal » en plein hiver, loin de la furia touristique. Là, c’est un bain de foule que nous sommes venus chercher. Attablés à l’Hotel de l’Europe (tenu par les ex-proprios du Petit Caporal, d’où notre présence), nous dégustons des fruits de mer et autres poissons en suivant la finale de la Coupe du Monde de football. En guise de cadeau, l’équipe de France m’offre une défaite à laquelle j’avais fini par ne plus croire. Merci !

Rappelons nous aussi de l’après-midi improvisée à Bastia avec Elsa, qui sortait tout juste de son boulot au Conseil Général, et le couple Nico/Sophie. Un gros Saint Pierre dégusté à quatre lors d’un dîner sur le vieux port, suivi une glace monstrueuse chez Raugi, le maître Bastiais, à la nuit tombée, nous avaient fait passer une journée superbe.


Nico, Sophie, et Elsa, et mon ex phone portable, prennent la pose sur le vieux port de Bastia.

Enfin, le concert des Muvrini à Levie, au coeur de l’Alta Rocca, garde une place à part. Sous le ciel étoilé, derrière l’église du village, les voix mêlées des frangins Bernardini, le spectacle de lumières (le même qu’à Bercy) furent comme d’habitude de haut vol. C’est sûr, c’est une ambiance différente des Chjami Aghjalesi au col de Pratu, c’est plus « grand public », c’est plus « commercial ». Et puis après ? L’émotion était en tous cas au rendez vous, et je dois avouer que quelques morceaux m’ont donné la chair de poule, voire des frissons. J’ai retrouvé des sensations d’adolescent, vécues à Felce, pour le « Giru 1992 » de l’album « Noi ». Quand on dit que la musique fait voyager dans le temps…

M comme Mathieu

Je connaissais un peu Mathieu avant de bosser avec lui à Zonza*. Nous partagions, avant ce séjour fructueux d’un point de vue de l’amitié, le même conseiller de stage BE (Manu pour ne pas le nommer), un penchant certain pour les réputations sulfureuses et un goût immodéré pour les blagues les plus grasses.

Deux mois plus tard, nous avons tant de choses en commun : un dégoût tout aussi immodéré de l’eau de la Purcaraccia**, la même vision des gens qu’il « considère comme inutiles », et « c’est tout ce qu’ [il a] à leur dire », et bien sûr des centaines de moments de bonheur, vécus dans les canyons, dans notre chambre, sur (ou sous ?) un quad*, ou encore dans notre antique grenier qui servait de pièce de vie commune.

Excellent grimpeur, beau gosse, provocateur hors pair, il est difficile de résumer ce bouillonnant camarade de jeu âgé d’un quart de siècle en une seule phrase. Si je devais me risquer à cet exercice, je citerais l’intéressé :

« On a beau parler de l’égalité des sexes, une femme, quand elle a 17 cm de viande dans le col de l’utérus, c’est l’être le plus soumis du monde ».


L’incorrigible Mathieu Blanchard, un fantastique compagnon capable de friser la poésie comme de déborder de grossièreté : un type en or !

M comme Mouskif

Beau petit félin que cet amusant animal. Tantôt joueur, tantôt calme, tantôt presque bestial, il s’est défait de tous les garde-fous de son maître (et geôlier), le Foué* pour réussir à s’échapper de son grenier sous les tuiles, au prix d’acrobaties incroyables. Je l’aime bien, moi, Mouskif.

N comme Nerveux

J’ai la réputation d’être nerveux, voire très nerveux. Une habitude, une façon d’être. Ma nature méditerranéenne, mon côté sanguin. Elsa me le reproche assez souvent, je ne le nie pas. Mon expérience en montagne s’étant jusqu’alors faite en très grande partie avec des gens compétents et ponctuels, il a fallu un temps d’adaptation. Voir une demi douzaine de clients arriver avec trois quarts d’heure de retard un jour où l’orage* est prévu pour la mi journée a de quoi me mettre hors de moi. Il m’arrive de ne me relâcher envers ces retardataires qu’en milieu de canyon…

Un matin, cela faisait deux jours consécutifs que mes clients se pointaient au local systématiquement les derniers. Il m’en manquait un paquet. Lorsqu’une partie se présente, il n’est pourtant que huit heures et quart à peine sonnées. Je rugis :

« Il est 817 ! Vous êtes en retard ! »
- Désolé, on croyait que c’était 8h30
- La ponctualité est une qualité !

Le Foué*, toujours zen, et qui passait par là les bras chargés de baudriers, intervint de façon imparable pour désamorcer mon courroux.

- La patience aussi, Romain.

Nous partîmes dans un grand éclat de rire tant cette réplique m’avait cloué, comme un magnifique coup droit décroisé le long de la ligne. Je n’avais même pas eu le temps de bouger. J’ai regardé la balle fuser, bouche bée… 15-0 pour « La vache placide de Bavella »***…


Une image rare : le L totalement détendu, calme, zen. Un cliché qui fera date.

** Voir "V comme Vomir", pour changer
*** Voir "S comme Surnoms"

vendredi 27 octobre 2006

LPCMI 2006: I,J,K,L comme...

I comme Incompréhensible

Comme dirait le Foué*, avoir son corps pendu à 40m du sol n’est pas une situation normale pour un être humain. Ainsi, il peut avoir des réactions totalement imprévisibles. En formation du BE, l’une des premières choses que l’on apprend est de ne jamais faire confiance à un client. Le Jouy, que j’ai eu par téléphone* hier alors qu’il finissait sa toute première journée de Fondamentaux à l’ENSA (le tout début de la formation d’Aspi), s’est entendu dire que « Les clients vont tout vous faire, même ce que vous n’aurez pas prévu ». Comme c’est vrai !

Pour ne citer que deux exemples, je me souviens d’un client (gérant une entreprise) ne sachant plus faire la distinction entre son pied gauche et son pied droit.
« Avance ton pied gauche, gauche, gauche, non gauche, l’autre gauche ! »

Mieux, une jeune et charmante expert comptable de 25 ans, venue avec son compagnon, m’a surpris comme je ne pensais plus pouvoir l’être. Au départ du canyon, les gens enfilent leur combinaison, puis leur baudrier. En général, ils s’en sortent plutôt correctement, je ne les abreuve donc pas d’instructions particulières pour ce faire. Je passe ensuite en revue chaque individu, vérifie le serrage des boucles, effectue les retours manquants, ajuste les cuisses, etc… Eh bien cette jeune femme était la seule parmi la douzaine à avoir enfilé son harnais comme un pull, les bras dans les sangles des jambes ! Tout le monde avait un baudrier à la taille, et elle ne s’est pas posé de question ! Et c’était pourtant une fille brillante ! Je n’ai pas pu réprimer un fou rire, expliquant ensuite à la miss que quand on nous dit que nos clients arriveront toujours à nous présenter une situation inédite, que l’on croyait impossible, eh bien c’est vrai ! Elle en était la preuve vivante…

Un « cheptel » de clients, toujours prêts à tout pour surprendre le jeune (et parfois moins jeune) moniteur…

J comme Jérôme

Basé à Bavella au niveau du Parc Aventures, le « divin chauve » est un camarade hyper attachant. Compagnon du beau Jean Pi, dont le cheveu frisé et les lunettes vissées sur le crâne sont la marque de fabrique, ces deux là font les beaux jours de la Via Ferrata de Bavella. Jérôme a également filé un coup de main au local, à l’inscription des gens en canyon. Son efficacité était redoutable, il remplissait les groupes

comme d’autres des verres à l’apéro. Apéro où il n’était d’ailleurs pas en reste. La compétence de Jérôme, ses qualités humaines en ont fait un bon ambassadeur de Corsica Madness* auprès de la clientèle. Sophie* en a parfois pris ombrage…

K comme Kroast

Vous connaissez les « Krisprolls », ces petits pains grillés Suédois du petit déjeuner ? Ben les « Kroast », c’est les mêmes, sauf qu’ils viennent pas de Suède mais de Casino… Ils ont la faculté de faire pousser les épaules de façon anormale, si l’on en juge la quantité industrielle que le Foué était capable d’ingurgiter !

L comme Lâche !

Il me cherchait un peu depuis le matin. Adepte du mauvais esprit, le dénommé « Boudiasse ». Taquins, lui et sa clique de jeunes Kinés. Sympas les bougres, mais le « Boudiasse » était bougon. Aussi, quand arrive le « rappel* d’initiation », après les deux premiers toboggans de la Purcaraccia, j’ai l’occasion de voir le larron à l’œuvre, corde en main. Un rappel* que je règle volontairement trop court, pour que les gens finissent en tombant dans une petite vasque, sans avoir à manœuvrer leur 8 dans l’eau, ce qui est pénible pour eux et chronophage pour tout le monde. Mais voilà, notre ami refusait de lâcher la corde. Elle ne dépassait du 8 que d’une dizaine de centimètres, de quoi placer une main. L’autre main était « au dessus », ce que je déconseillais à mes clients débutants.


« Lâche la corde, lâche, lâche, lâche ! » lui dis-je d’un ton allant en s’énervant, répétant sans cesse l’instruction de base qui était de lâcher cette p… de corde. Rien n’y faisait, ce grand bonhomme déguingandé faisait remonter la corde centimètre par centimètre, jusqu’à ce que sa main se « fasse bouffer » par le 8. J’ai vu son visage se crisper.

- Lâche bordel, tu vas lâcher oui !


Je perdais ma patience déjà bien maigre… Je réitérais mon injonction, en hurlant cette fois !

Il finit par obtempérer en laissant échapper un petit piaillement, et s’écrasa dans l’eau. Je me mis à hurler de toutes mes forces :

- Quand je dis lâche, tu lâches !

Je ne me serais pas forcément souvenu de ce petit épisode si le Foué*, parti plus tard avec son groupe, et qui se trouvait encore sur la marche d’approche au moment des faits, ne m’en avait fait part. Il a, de l’autre côté du canyon (en rive gauche) et sur un sentier escarpé, parfaitement entendu mon dernier coup de gueule, qu’il m’a cité mot pour mot le soir au souper. Des fois il faudrait que je me calme…


A suivre...

mercredi 25 octobre 2006

LPCMI 2006: G et H comme...

G comme Grimpe

Ce fut bref cet été… Entre l’entraînement à la course à pied, les jours de repos au village, j’ai très peu grimpé. Passons sur la petite séance de bloc à Petreto en compagnie des deux mutants qui adorent cette discipline. Je ne me transcende qu’en falaise, mon arme étant la combativité, pas la force pure… Notons au passage une très belle journée à la Pointe des Sept Lacs fin août, avec Sophie Di Sante dans le rôle du second habituellement dévolu à Viguen. Une magnifique escalade (parfois engagée en dalle) avec les eaux bleus du Capitello en toile de fond. Et un retour alpin, avec assurage en mouvement de la « Brillant Brunette » sur des boucliers granitiques immenses. Un passage un peu technique à la brèche de Sorbo, puis en face Nord, superbe de solitude et de silence. Une descente dans un pierrier austère jusqu’au lac, ses dégradés de bleu incroyables, et la chaleur de l’astre du jour. Cependant, le plus bel instant grimpe restera pour moi, après une tumultueuse et bruyante journée en canyon, le repérage, un soir d’été, à Bavella, d’une mini grande voie pour clients, en compagnie de Mathieu* Blanchard.

Nous vécûmes là un moment exceptionnel de douceur de vivre, de mélange de couleurs, de beauté minérale. Un repérage en solo intégral de la falaise de Margherita, sous les yeux médusés d’une grimpeuse transalpine pendue dans sa corde en moulinette, puis trois longueurs en baskés, anneaux autour du buste, dans une ambiance particulière, indescriptible. Des moments où le bonheur était palpable. Nous étions au cœur d’un site déserté par les touristes à cette heure avancée. Derrière nous, les aiguilles rougissaient au soleil couchant ; en face, le massif des Paliri, où le granite ocre se mêle au vert intense des pins laricci. Au loin, de part et d’autre, à perte de vue, la mer. Un sentiment d’insularité fort, l’impression de faire corps avec l’île, d’être la Corse. Au sommet de la Grande Dalle, un panorama magique s’offrit à nous ; si ce n’était pas le Paradis ça y ressemblait fichtrement. La petite polaire se supportait tout à fait, une légère brise berçait nos visages. Le calme était apaisant. Nous avons posé un rappel* en fil d’araignée, puis nous nous sommes offert un 6b en baskés pour découvrir un autre amarrage plus simple d’accès. Un moment d’amitié aussi, de partage, de discussion. Sans jamais chier dans la bouche de la mère de l’autre, dois-je préciser. Ca change ! Et c’était bien. Relaxés, nous avons, ce soir là, trouvé François énervé voire presque agressif : c’est dire si nous étions en paix !


Sortie du dièdre raide, place à de la dalle sur les pieds à la Pointe des Sept Lacs. L’unique grande voie en Corse cet été…

G comme Guide de Haute Montagne

J’ ai croisé un guide très sympa à la Purcaraccia. Un métier de seigneur, auquel est depuis peu promis notre jeune ami le Jouy, ce qui nous ré-jouit, si je peux me permettre ce médiocre jeu de mots. Mais là n’est pas le propos. Je me fais accoster par un guide de Méribel donc, avec son client. J’en ai moi-même une douzaine. Après avoir discuté le bout de gras avec ce sympathique personnage, je vois qu’ils n’ont pas le matos adapté. Normal, mon interlocuteur m’explique qu’ils sont venus en voyage grimpe, et qu’ils ont profité d’une journée de battement pour s’offrir ce beau canyon. De façon générale, il n’a que des clients avec qui il part en voyage, parfois plusieurs semaines, en expé au Népal par exemple. Le rêve !

Je leur propose, puisqu’ils sont deux, de mettre mes cordes en place et de les en faire bénéficier avant mon groupe, pour qu’on ne les gêne pas. Le guide décline poliment et lance son rappel vert de 8mm dans le vide. Cette corde inadaptée tombe dans une marmite et s’emmêle instantanément. Il en résulte une plâtrée de nouilles absolument inextricable. Il remonte la corde, c’est une pelote géante avec laquelle aimerait sûrement s’amuser un gros chat… Il en a pour l’après midi à défaire les nœuds ! Je réitère mon offre, qu’il accepte cette fois volontiers. Il range sa « boule verte » dans son sac. Mes cordes sont en place en deux petites minutes, habitude oblige. J’en profite pour lui indiquer les deux toboggans du bas, que l’on ne peut pas deviner lorsqu’on découvre le canyon, ce qui est son cas. Bien content de bénéficier des conseils d’un « ouvrier de la Purca », il me remercie chaleureusement.
Je lui promets de faire descendre son client, en échange de quoi je lui demande de bien vouloir contre-assurer du bas le premier de mon groupe. Il accepte volontiers.

« Qui c’est, tu le connais ? » me demandent certains de mes clients.
- Non pas du tout, mais c’est un Guide de Haute Montagne d’une région que je connais bien.

Je vante en quelques mots ce diplôme mythique aux quelques curieux de mon groupe.
Je prends le temps de mettre notre nouvel ami en garde : l’approche du rappel est très glissante, surtout avec ses baskés. Il installe son système de freinage puis, me voyant debout dans la pente en 5-10, me rejoint sans trop se méfier : la sanction fut imparable : zip, vol plané, et retour fracassant sur le flanc droit, pendu à la corde. Le « public » a eu peur pour lui, et j’avoue que ce n’est pas tous les jours que l’on voit un guide s’étaler de tout son long ! Cela n’a par contre pas du tout entamé la bonne humeur de ce montagnard à médaille qui n’avait vraiment pas le ton hautain de certains de ses camarades corporatistes… J’ai promis de passer le voir l’hiver prochain au bureau de Méribel.

H comme Hassan

Authentique homme à tout faire d’Henri, ce garçon est d’une grande gentillesse. Véritable bricole tout, il peut repeindre une pièce, refaire un toit, nous offrir des salades, et même jouer la comédie en feignant de faire rôtir des poulets à Pagliacciu devant des hôtes émerveillés…

H comme Hommage

Le plus beau compliment que l’on m’ait fait cet été émane de François Chopard : je le cite avec le plus de précision possible et vous laisse en juger… la violence !

« La première fois que l’on rencontre Romain et que l’on discute avec lui, normalement, on vomit ».

Je crois que c’est tellement émouvant que cela se passe de commentaires !

H comme Henri

L’homme de Zonza*. A tout juste 50 ans, Henri Santoni est une pile électrique. Personnage multifacettes, charcutier l’hiver, AMM l’été, homme d’affaires 24h/24, Henri brasse sans arrêt, bouillonne d’idées pour développer ses activités, et se dit toujours endetté : « Quand j’ai 10 euros, j’investis 12 ! ». Le mollet dodu, le cheveu rare mais long et frisé, le sourire charmeur, Henri n’est pas loin de posséder la moitié de son village natal. Cela lui vaut sans doute quelques inimités (on est en Corse !) mais aussi le respect de tous. Son tissu relationnel est aussi dense que le réseau des transports en commun à New York et son goût pour le théâtre dans les négociations n’est pas feint. Si nous nous sommes parfois affrontés amicalement pour des histoires de météo, d’orages*, d’annulations ou de reports de sorties, je dois dire que j’ai « accroché » avec le bonhomme. Grand cœur, bon vivant, parfois flambeur (il faut le voir déambuler dans Zonza* au volant de son PT Cruiser cabriolet, un bon vieux Jim Morrisson hurlant dans les hauts parleurs de la stéréo), il m’est apparu réglo en affaires. Henri a également depuis peu goûté aux joies de la paternité... Un homme à qui tout semble réussir !

A suivre...

dimanche 22 octobre 2006

LPCMI 2006: E et F comme...

E comme Echec

Le gros échec de l’été, celui qui me rendra presque malade, c’est l’acte manquée de la « Cullata di u San Petrone », mythique épreuve sur le culmen de la Castagniccia, chez moi. Un truc qui me tient un peu bêtement mais particulièrement à cœur depuis quelques années. 4ème en 2000 en étant le seul coureur à m’insérer dans un classement dominé par une huitaine de légionnaires affûtés venus de Calvi, j’ai remporté l’épreuve, un peu à la surprise générale, en 2004.

Amoureux de ce parcours taillé pour moi avec de la pente et peu de portions « roulantes », j’ai pour habitude d’y donner rendez-vous à mes amis du village, à ma famille, pour que cette souffrance soit un bonheur partagé. J’aime me battre et me faire péter le caisson sous les châtaigniers, j’aime être en forme, me sentir faire mal aux autres concurrents, j’aime le pierrier aride sous le sommet, en plein cagnard. J’aime enfin l’ambiance bon enfant qui règne dans l’aire d’arrivée, les « paghjelle » en fond sonore, les amis du canton venus se divertir, le folklore ambiant, les ateliers de la « Fiera », les animaux, les produits locaux, les beignets que je m’offre après l’effort. J’aime cette foire estivale qui se tient tous les ans le dernier week-end de juillet, au col de Pratu , un haut lieu de mon enfance.


Le L seul au sommet du San Petrone. Deux mois d’entraînement jetés à la poubelle…Même si Jipé pense que « s’entraîner à mort, et finalement, ne pas courir, c’est beau, c’est romantique », je n’ai toujours pas digéré cet accroc dans mes projets…

Battu l’an passé, j’avais toutefois descendu mon chrono de près de 2 minutes et terminé sur le podium. Le niveau était monté d’un cran, avec notamment la présence d’un vainqueur de « l’Interlacs », la course Corse de référence. A la lutte avec mes deux prédécesseurs à la montée, j’étais passé au sommet moins de 45’’ après le futur vainqueur, en 46’35. L’explication allait se poursuivre à la descente. Une chute à pleine vitesse m’avait définitivement empêché de défendre mon « titre ». Je m’étais promis, et je l’avais annoncé au micro après la course, de revenir plus fort en 2006. Et j’ai tenu parole. J’étais prêt. Dès la fin du mois de mai, à Grenoble, je m’entraîne, fais du foncier sur du plat : il s’agit de choper du rythme ! Avant de partir, je monte à la Bastille, un petit chrono pour voir : sans forcer à outre mesure, et surtout sans y croire, je m’approche à 8’’ de mon record. En Corse, je fais deux montées en une semaine au San Petrone, pour repérer. La première avec un sac à dos, la seconde à vide, et je fais le meilleur temps jamais réalisé à l’entraînement. En disposant d’une bonne marge. A Zonza*, après le travail en canyon, je pars courir dans la montagne. Au refuge des Paliri à Bavella, ou sur les sentiers de l’Alta Rocca, notamment ceux de Levie. 44’ au lieu des 3h annoncés pour le quidam, le tout en déroulant, sans jamais être trop mal : la foulée est ample, je prends du plaisir. Je repense aux dires du S quand nous parlions de cette activité ingrate. Je ressens le bien être qui était le sien quand, au top de sa forme, il courait quotidiennement à un rythme infernal, se sentant presque voler… En somme, je me fais une joie d’en découdre dimanche, sur mes terres.

Un changement de programme inédit depuis la création de l’épreuve (qui avait traditionnellement toujours lieu le dimanche du week-end « à cheval » entre juillet et août) et la disparition de mon téléphone* m’ont fait rater ce rendez-vous cher à mon cœur. J’aurais préféré courir et faire 10ème que d’être frustré comme cela. Au final, après la lecture des résultats dans le journal, je prends mon vélo, que je n’ai pas touché depuis un mois et, de rage, me lance dans un contre la montre « test » autour de chez moi : une côte de 5km que je parcours, montre en main depuis l’enfance. J’explose le record de plus de 25’’… un record qui datait de 2005, quelques jours après ma course. De quoi raviver mes regrets…

F comme Frayeur

Un grand moment rétrospectivement, mais une bonne décharge d’adrénaline sur le coup. Saut de 9m à la Vacca*. En charge d’un gros groupe, Mat et moi nous répartissons la besogne. Je gère les descentes sur corde, pendant qu’il s’occupe de faire sauter les plus audacieux. Je dispose, soit d’un rappel* classique dans la fissure dièdre évasée à droite du bloc, soit de l’option plus ludique du trou noir où il faut se glisser, avant de se faire mouliner dans l’obscurité et dans le vide pour atteindre l’eau de ce qu’il convient d’appeler une grotte. De là, les clients se délongent et regagnent la vasque extérieure en nageant, prenant bien garde de ne pas recevoir sur la tête un hurluberlu en plein vol.

Mathieu* fait donc sauter les plus dégourdis pour ce que nous appelons le « gros saut » du canyon. Il est évident que nous n’envoyons personne au 16m, encore moins au 24 ! Comme cela arrive toujours, Mat doit composer avec des gens plus ou moins à l’aise au niveau de la prise d’appel, qui s’avère cruciale. Une boule glissante qui pose problèmes aux sédentaires peu habitués aux activités motrices. Un de ses clients vient de se rater et de partir en glisse… En l’air, il a logiquement pivoté, et s’est écrasé plat dos dans la vasque. Souffle coupé, paniqué, il est secouru par les autres clients déjà en bas. Ils l’escortent jusqu’aux parois bordant ce magnifique bief. Mat gère la « crise » du haut du bloc, s’assurant que le malheureux ne souffre de rien de grave et hurlant des instructions aux « sauveteurs » improvisés : « Mettez le sur le dos, nagez avec lui, emmenez le ! ». De mon côté, j’ai longé un adulte légèrement grassouillet à ma corde de « va et vient » monté sur demi cabestan, et voilà mon gus qui s’engouffre, comme d’autres avant lui, dans le trou noir. Alors que les jambes et la moitié du tronc pendent déjà dans le vide de la grotte, il se coince le haut du bide et se met à hurler. Je le pousse doucement pour qu’il tombe dans le trou comme prévu, rien, il beugle de plus belle :

« Je suis coincé ! Aaaaaaaah ! ». Merde.

- Mat, tu peux venir deux secondes, j’ai besoin d’un petit coup de main…

dis-je d’une voix que je veux le plus calme possible. Son sauteur en herbe semble récupérer doucement, mais on pourrait croire que Mat a pris un coup de vieux lorsqu’il me rejoint. Nous tentons de remonter l’infortuné hexcentrique humain : rien à faire, les trois quarts de son corps sont déjà plein gaz. Il crie à nouveau. Merde ! Pendant que je gère la corde, Mat force son bras gauche à passer dans un trou de souris, alors que l’homme, affolé, halète fortement. Bras gauche le long du corps, non sans efforts, nous le glissons doucement et pop ! il disparaît d’un coup dans le trou comme un suppositoire dans un anus beurré de Mytosil. Entre un saut raté et son évacuation improvisée d’un côté, les cris de terreur de l’ « homme-friend » taille 50 de l’autre, je peux vous assurer que la personne suivante ne mouftait pas à l’approche de l’obstacle…

F comme Flèche

Le but principal. La flèche, la maille, l’oseille, trois termes qui désignent une même chose : la seule en fait qui permet d’accepter d’être tous les jours de sortie avec des débutants parfois complètement hors de forme. Encadrer bénévolement de temps en temps, c’est bien, mais « faire de la flèche », c’est quand même plus motivant !

F comme Foué

Difficile de parler du Foué sans tomber dans la redondance, car tout semble déjà avoir été dit sur l’enfant Meylanais… On sait que l’on peut garer un 38 tonnes à l’ombre de son torse surdéveloppé, on sait que c’est un véritable jukebox à anecdotes*, on sait qu’il est beau, charismatique, qu’il mène la barque du GUCEM depuis de nombreuses années aux frais des ASSEDICS, on sait qu’il vénère le bloc autant qu’il abhorre la montagne… Que dire de plus ?

Que c’est un bon professionnel, un « jeune moniteur », qu’il a le contact agréable avec les client(e)s, qu’il garde son calme et qu’il n’est jamais pressé. Doté d’un bagout naturel cinq étoiles, il a été d’une aide précieuse pour désamorcer quelques conflits internes opposant parfois Mat à Sophie*. Sa présence en revanche lors de conversations musclées avec Henri concernant la météo n’a pas toujours été assurée, comme le lui ont parfois reproché ses deux acolytes, meneurs de la « fronde ».

Excellent cuisinier, il a souvent pris en main les hyper-caloriques repas du soir, ceux qui permettent de tenir le lendemain. Il est vrai qu’un kg de spaghetti bolognaises maison après une bonne soupe de poissons (pêchés par ses soins s’il vous plaît) font plus pour le corps humain qu’un bol de café agrémenté de trois maigres « kroast » et un sachet fraîcheur de gâteaux secs « Gerblé », notre « pain quotidien » habituel.

A suivre...

samedi 21 octobre 2006

LPCMI 2006: C et D comme...

C comme Consignes

Du briefing général aux consignes spécifiques à chaque obstacle, le discours était bien réglé. Du mythique « Vous avez tous, sans exception, des chaussures de merde » au « Attention… ça glisse ! » que les clients reprenaient en cœur en passant par le sobre et classique « C’est beau… on avance !», nous avons pu constater qu’en moyenne, un client sur deux ne prête pas attention aux instructions même les plus élémentaires.

Je me souviens d’un médecin au premier saut de la Vacca* :

« C’est très simple : tu te concentres uniquement sur l’appel, à un pied. Tu pousses sur un pied, pas à pieds joints. Tu es dynamique, tu me fais un saut volontaire, agressif »

- Ok, c’est bon, j’ai bien compris. J’y vais ?

- Quand tu veux…

Et le sympathique bonhomme de venir mourir au ras du bloc après un appel des plus mous, pris à pieds joints…


Votre serviteur donnant les fameuses consignes lors de l’enchaînement des 3 vasques suspendues au canyon de la Purcaraccia.

C comme Corsica Madness

CENSURE PAR LE CSA (Comité de Sauvegarde des Apports en euros)

C comme Craquage(s)

Ils furent nombreux, en privé ou avec des clients. La faute, il faut bien l’avouer, à un Mat Blanchard particulièrement en forme et à un Foué* égal à lui même ce qui veut tout dire. Entre les reprises en cœur et en public des plus grands tubes de Gainsbarre (« Je vais et je viens… » ou pire « Love on the beat »), les amabilités faites à nos mères respectives (CENSORED), la violence a atteint un niveau intolérable pour les gens sains d’esprit.

Heureusement, il y a bien longtemps que nous avons perdu le notre et sommes rodés à ce genre de connerie ; voir la pastille anale d’un Mat accroupi s’approcher dangereusement du visage désolé du Foué*, dérangé en pleine séance d’étirements dorsaux, fut un grand moment dont peu de gens seraient à même de comprendre le sens profond (et c’est tant mieux).

D comme Dégueulasse

Trois mecs qui vivent seuls, à force, forcément, ça devient crade. De plus, tout était prédisposé pour que les choses tournent au carnage : un grenier en guise de salle à manger, pas d’eau courante, trois types dont l’humour douteux a donné la nausée à plusieurs générations d’étudiants grenoblois, une abstinence forcée…

Je garde à l’esprit quelques clichés de notre vie commune : le grenier tout d’abord ; y passer le plus clair de son temps libre n’est pas chose commune dans une habitation « normale ». Amoureusement aménagé par notre « maman » adoptive, François, nous disposions, dans cet espace au plancher poussiéreux et situé directement sous la charpente tuilée, de deux « pièces ». La première comportait une cuisinière, un « micro-zonza », une table en bois assortie de quatre chaises ; le mobilier « Louis XV » de la seconde se composait d’une table basse et de deux vieux fauteuils, au milieu d’un bric à brac de vieilleries appartenant à Henri.

Comme je l’ai dit, l’eau courante n’était pas disponible, ce qui rendait les tâches les plus simples vite pénibles.. Vider son bol le matin, l’eau de cuisson des pâtes, ou faire un brin de vaisselle était donc impossible. Nous avions une bassine remplie d’un jus marronnâtre fait de liquides divers, servant de « tout à l’égout », et passant généralement une petite semaine avant d’être trimballée, pleine à ras bord d’une mixture putride, jusqu’aux toilettes de notre modeste logis pour être enfin vidée.

Autre moment fort de l’été, la dégustation de l’eau de la Purcaraccia, enrichie aux oligo-excréments. Cela mérite le détour, nous y reviendrons plus longuement**.

De façon quotidienne, les petits gestes, les banalités versaient aussi parfois dans le cradoc. Jugez plutôt : Un mince rideau de tissu séparait notre modeste salle de bains de la chambre royale du Foué*. Salle de bain comprenant évidemment le chiotte, exiguïté oblige. Il n’était pas rare, le matin, de se laver les dents à moins d’un mètre d’un collègue déféquant lourdement, lâchant par instants un petit râle de plaisir alors qu’un étron gigantesque et odorant venait de quitter la rade anale pour prendre le large… J’ai même souvenir, puisque vous semblez en vouloir encore, de mes collègues me demandant de faire couler l’eau du lavabo tant la diarrhée violente dont j’étais victime suite à l’ingestion d’eau de torrent** représentait non seulement une puanteur sans nom, mais aussi une nuisance sonore intolérable…

A suivre...

** Voir "V comme Vomir"

jeudi 19 octobre 2006

LPCMI 2006: A et B comme...

A comme Anecdote(s)

Difficile d’y couper quand on passe ses journées d’été en compagnie de plus de 300 clients d’horizons différents, et ses soirées auprès de l’intarissable Foué* Chopard plus connu sous le nom de « Machine à anecdotes ». Elles ont été nombreuses et je promets de vous en livrer les plus belles dans la suite de ces lignes.


Foué, l’homme aux milles anecdotes, ne se sépare que rarement de son sourire charmeur. Dans sa couchette, Mat Blanchard, regard angélique, cache bien son jeu…

A comme Alta Rock Café

La propriété d’Henri, comme tant de choses à Zonza*. Cet été, il en a confié la gestion à Caro. Idéalement placé au cœur du village, l’Alta Rock ne semblait pas rencontrer le succès escompté au début de la saison. Petit à petit, le public ne s’y est pas trompé et s’est pressé d’aller déguster les « Golgoth-glaces » et autres « monstre » milk shakes maison. Il faut dire que la personnalité de Caroline déroute un peu au premier abord. Cette grande et pulpeuse brune, marin de son état, gagne à être connue.

Au début, les relations étaient tout juste cordiales avec Caro. Il était clair qu’on préférait amener les clients à la crêperie où l’accueil semblait plus chaleureux. Pour ne rien arranger, en faisant une vaisselle derrière le comptoir du bar de l’Alta Rock, après avoir obtenu une autorisation réticente de Caroline, j’avais complètement bouché le lavabo dépourvu de siphon ! C’est à coups de Destop et grâce à la patience du Foué* que nous avons fini par déboucher le merdier. Et Caro s’est détendue, pour ensuite carrément se lâcher (du moins verbalement) lors de fins de soirées animées avec Mathieu* et moi…

A comme Arrosé(s)

C’est le propre du canyon ; une bonne partie de son « sel » : les rappels arrosés. A la Purcaraccia, magnifique itinéraire idéal pour travailler, il y en a un grand de 45m. Une goulotte de granite peu raide sur le haut, et très glissante dans la partie médiane. Quasiment tous les clients s’y vautrent et se retrouvent sur le ventre, le dos, ou à genoux. La routine quoi. Le premier client est contre-assuré du haut, il « tient » ensuite les cordes pour les suivants. Rassurant mais pas hyper utile, étant donné que l’on fait souvent descendre les clients avec un « vertaco » qui freinerait même un tank. Pour ma toute première journée seul avec mon groupe, un dénommé « Gilou » se met une bonne ratasse et se retrouve à l’équerre, allongé dans la goulotte. Il a bien évidemment lâché la corde, au mépris de la consigne* la plus importante, et tente vainement de se relever. Je lui hurle de continuer à descendre, même dans cette position inconfortable : quelques mètres plus bas, un replat lui permettra de reprendre une posture plus orthodoxe. Il n’entend rien, assourdi par la cascade et affolé par le débit d’eau qu’il parvient (il faut le faire à cet endroit là, qui ne mouille normalement que les pieds) à se prendre en pleine face. Le « contre-assureur », investi dans sa mission, lui aussi paniqué par cette situation qui deviendra très vite banale, se pend dans la corde de Gilles, l’empêchant fatalement de bouger d’un pouce... J’en suis quitte pour rejoindre ma « victime » via l’autre corde, libérée par un client plus adroit (heureusement, je n’avais aucune envie de descendre sur corde tendue), remettre le « naufragé » dans le bon sens, hurler sur le type du bas pour qu’il donne du mou, et remonter 20m au basic… Vu la chaleur étouffante qu’il faisait ce jour là, et ma combinaison 5mm (je n’avais pas encore récupéré de « shorty »), je suis arrivé en haut passablement déshydraté et en hyperthermie !

Le premier grand rappel de la Purcaraccia, où 9 clients sur 10 goûtent aux joies de la zipette…


B comme Béa

Trois générations à la crêperie : Béa, sa mère, et son fils. J’ai passé de nombreux après-midi, attablé sous la protection des parasols, à déguster crêpes au chocolat avec boule de glace ou autres crêpes nutella offertes par des clients au retour de canyon. Des moments de débriefing sympas, où le sentiment d’avoir bien travaillé se mêle harmonieusement à la fraîcheur piquante de l’Orezza dans la gorge, au décolleté d’une jeune cliente épanouie, et à la vue magnifique sur l’Alta Rocca.

B comme Boulets

Le terme politiquement correct serait « clients ». Bon, j’exagère c’est vrai, mais l’une des expériences les plus marquantes de l’été a été pour moi la découverte du handicap physique certain de l’être humain moyen. En clair, le vacancier, sédentaire dans l’immense majorité des cas, éprouve des difficultés motrices. Pire, il peine même à se déplacer sur un sentier, un simple sentier. Quant aux habitués des bureaux et des emplois à fort stress, accros à la cigarette, ils toussent, crachent, soufflent et halètent, rougis par l’effort à la moindre déclivité. De mon côté, je respire calmement par le nez en m’efforçant de ne pas faire éclater ce peloton poussif…

Si certains clients se montrent à l’écoute des consignes*, finissent par prendre leurs marques et à évoluer correctement, d’autres sont de véritables croix et nous font parfois vieillir de 10 ans**. J’ai le souvenir marquant d’une journée à la Vacca* avec Mat où nous avons cumulé de sérieux « cas ». Lors du premier saut, nous proposons deux options : un saut à 2m, un autre à 4. Il m’est arrivé de faire sauter tout le monde à 4m du premier coup, mais là, à deux moniteurs, le choix s’offre aux canyoneurs. Surprise, le cheptel se répartit équitablement sur les deux ateliers. Premier à sauter sur le petit bloc, dont je me charge, un jeune homme. La petite trentaine probablement, petite barbe de trois jours, un peu « effemminé ». Il refuse l’obstacle, chouinant tel un pré-ado : « C’est horrible, c’est trop haut, je n’y arriverai jamais ! ».

Etant donné qu’on se trouve là devant le « jump » le plus bénin du canyon, on comprend que ça part fort. Je décide d’en faire sauter devant lui, et voilà que les deux suivants refusent d’être les premiers ! Ce petit monde commence déjà à m’énerver, il n’est pas 10h30, la journée va être longue ! Il a fallu que je pousse ce poltron pour qu’il atteigne enfin la première vasque, dans un petit cri. Bien sûr, au saut de 9m, il a été mouliné. Arrive le « soboggan » ou « toboggojump », bref le magnifique rideau d’eau à négocier assis ou tête en avant pour les plus aguerris. Revoilà mon courageux client freinant des quatre fers, couinant quand j’accompagne son avancée, une main dans son dos. Mathieu* est déjà en bas dans la vasque, à admirer les paysage en compagnie de la vingtaine d’autres clients. Je sens le sang monter et je m’énerve :

« Si tu n’y vas pas, je vais encore être obligé de te pousser ! »
- Mais ce sera pire ! pleurnicha-t-il.
- Ok.

Et moi de me placer derrière lui, de caler un pied sur ses fesses, jambe fléchie. Je l’ai éjecté d’un mouvement d’extension de la guibole en force max. Poussant un autre petit cri, il a disparu dans le vide. Quelques secondes plus tard, il nageait paisiblement dans la superbe vasque, me faisant un signe du pouce pour m’informer que tout allait bien… Comme quoi, certains ont vraiment besoin qu’on leur botte le train, au sens propre !

A suivre...
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** voir "F comme Frayeurs"